mercredi 26 novembre 2014

L'atelier

 Pour qui ?

Pour n'importe qui en a le désir. Désir de créer, de manipuler, d'entrer en dialogue avec la matière, imaginer, essayer, inventer, oser ... Le processus de création est à l'image de la vie. 

Pour reprendre les termes que Clarissa Pinkola Estes emploie dans son étude du conte Les souliers rouges, il s'agit, à travers l'exploration progressive des arts plastiques, de découvrir sa créativité singulière, unique et de se (re)créer une identité et une vie cousue main. Bâtir son désir de création et à travers lui, redécouvrir son désir de vie, de mouvement et de transformation.

Pourquoi ?

«… l’expérience créatrice n’a pas pour intention première de faire de l’art, mais de vivre. De ressentir ce vivant au-dedans de soi, de l’ex-primer, de se le re-présenter, de le regarder, de l’entendre… »


Il s'agit d'un accompagnement vers la création, dans le plaisir et le jeu. L'atelier est fondé sur votre désir de créer et votre plaisir à pratiquer. Les consignes que je propose ont une fonction de déclencheur. Ce n'est pas un cours où l'on apprend laborieusement des techniques, bien que l'accompagnement que je propose passe aussi par la transmission de procédés et de savoir-faire, mais un espace-temps qui vous appartient, pour explorer les propriétés des différents médias et inventer vos propres manières de les utiliser.


Se confronter à la matière et accepter de la laisser nous conduire vers son énigme, apprendre à écouter et à apprivoiser son intuition, s’abandonner au plaisir du geste spontané comme à l’élaboration progressive d’une forme...

Renoncer aux normes étouffantes du beau, du techniquement bien fait, pour écouter lorsque l'on ressent que c'est juste. La justesse peut se passer de technique, elle se trouve dans la transcription d'une émotion, d'une intention, d'un désir. Elle peut aussi se trouver dans un hasard qui révèle, une absence d'intention, un lapsus plastique qu'on est seul à comprendre, mais qui est perceptible par celui qui regarde.

Comment ? 

À travers de multiples pratiques plastiques - dessin, peinture, modelage, collage, assemblage - guidé par des propositions sollicitant l’imaginaire, l’émotion et la sensorialité. 

En groupe : L'accompagnement est individuel à l'intérieur d'un petit groupe de 6 personnes maximum, le dispositif groupal permettant de mettre en commun l'énergie et de s'en nourrir, dans une atmosphère calme, favorisant l'immersion et coupée du réel.

Il est également possible de prendre rendez-vous pour des séances individuelles de 2 à 3h, au moment qui vous convient, le mardi de 11h à 22h, le mercredi de 14h à 20h et le vendredi de 13h à 19h.


Où ? 

L'atelier se tient au Shakirail, 72 rue Riquet, 75018 Paris (M° Marx Dormoy, Riquet, Stalingrad) dans les locaux de l'association Curry Vavart, collectif d'artistes pluridisciplinaire qui organise et développe des espaces de vie, de création et d'activités partagées depuis 2006.

Quand ?

Le samedi de 14h à 18h, en petit groupe :
4 heures pour pouvoir s'immerger dans la création.

Sur rendez-vous, en séance individuelle de 2 à 3h
Le mardi de 11h à 22h,
Le mercredi de 14h à 20h,
Le vendredi de 13h à 19h.


L'inscription

Elle se fait d’une séance à l’autre ou pour plusieurs séances, par mail ou par téléphone. Il est possible de venir une fois de temps en temps comme de venir chaque semaine. 

Si la continuité est importante dans ce qui ne peut être qu'un processus, un chemin dont on ne sait à l'avance où il nous conduira, cet atelier se veut cependant, pour chaque participant, un espace-temps à s'approprier, en fonction de son désir, de son rythme et de ses attentes.

Combien ?

20 € la séance, matériel compris.
Sauf les toiles, à ramener si vous souhaitez travailler sur ce support.

Me joindre :

Par mail à atelierdesmetamorphoses@gmail.com
Par téléphone au 06 86 65 35 49 (Judith)

mardi 25 novembre 2014

Le coloriage ... c'est juste du coloriage.





Non, je n'ai rien contre le coloriage. N'importe comment, c'est mieux que regarder la télé. J'imagine même que dans la répétition du geste, il puisse y avoir quelque chose d'apaisant. Mais de là à nommer ça art-thérapie, il y a un fossé, allègrement franchi par les auteurs et éditeurs de ces ouvrages qui auraient pu avoir l'humilité d'intituler leur collection "coloriage détente" ou autre chose, ils ont des conseillers en communication qui sont payés pour ça.

De la même façon que les mots fléchés ne sont pas de la littérature, le coloriage ... c'est juste du coloriage, pas de l'art-thérapie.
... Et par ailleurs, si l'on se trouve en état de stress, il est peut-être plus thérapeutique de chercher à en découvrir la cause et à expérimenter des solutions, plutôt que de faire du coloriage pour tenter d'y échapper ! 

Ca me rappelle de mauvais souvenirs d'école maternelle : mes instits me faisaient les gros yeux parce que je dépassais des contours imprimés.
Se sont-ils un jour posé la question de ce que pouvais signifier symboliquement "ne pas dépasser" pour un enfant de 3, 4, 5 ans ?
Ca ressemble un peu trop à une injonction à se conformer au moule, à rester dans les limites balisées. 

Sans doute y'a t'il une autre explication, pédagogique, ou peut-être au niveau du développement psychomoteur, mais je l'ignore.

La plupart du temps, quand on met des enfants et de la peinture dans la même pièce, pas besoin de leur expliquer comment faire ! (A moins que ces enfants ne soient déjà très abîmés, car ils perdent alors leur capacité à jouer; C'est d'ailleurs un grand pas dans la thérapie d'enfants que le travail de D.W.Winnicott qui a théorisé la fonction psychique du jeu chez l'enfant et crée des dispositifs de médiation thérapeutique mettant en oeuvre le jeu - play = jeu libre, opposé à game = jeu avec des règles).

Je digresse, mais finalement cette parenthèse me renvoie à mes moutons, puisqu'on peut tout à fait faire un parrallèle intéressant entre ces albums de coloriage estampillés "art-thérapie" et ce que Winnicott nomme game ( = jeu avec des règles ) par opposition au jeu libre, à la créativité spontanée que l'on observe chez les enfants qui jouent, et qu'il nomme play,  que l'on retrouve dans le processus de création artistique.  

Bref, au dela du fait que ce genre d'ouvrage décrédibilise une pratique déjà fragile et un peu nébuleuse (différentes écoles de pensée avec différentes pratiques, certaines très psychanalytiques et interprétatives, d'autres un peu new age ...) je crois que ce qui me mets le plus en pétard c'est que, par un biais pernicieux de pseudo développement personnel, on incite les gens à rester dans les cases, à ne pas dépasser, ne pas déborder.

Cessons de colorier à l'intérieur des contours faits par d'autres, dépassons, débordons, inventons de nouveaux contours à nos vies ! 



Andy Warhol avait une façon bien à lui de faire du coloriage :




lundi 24 novembre 2014

La vacuité comme vide créateur.


A la dernière séance, une des participantes m'a déclaré :
 « C'était bien d'avoir quatre heures ».

C'est vrai, ça : à quel moment, entre le boulot, les transports, la famille, les copains, les trucs à faire de toute nature, s'autorise t'on quatre heures pour se consacrer à soi et ne rien faire d'utile, de rentable ?

Winnicott écrit quelquepart que la première activité créatrice est la rêverie éveillée.

A quel moment s'autorise t'on à errer, au propre comme au figuré, sans chercher à produire - ou au contraire, à se remplir ? Quand permettons-nous à nos esprits d'être vacants ?

Il me semble que c'est dans ces moments de vacuité que l'on a des idées, qu'on rêvasse, qu'on imagine, qu'on crée et également que l'on développe progressivement une pensée complexe. De la multitude d'idées qui nous traversent, on en saisit quelques unes au vol, on les triture, on les manipule sans même parfois s'en rendre compte, jusqu'à ce qu'emmerge à la conscience quelque chose qui ressemble à une forme.
Des études récentes tendent même à prouver que c'est dans ces moments que notre cerveau résout les problèmes complexes.

Nous vivons (enfin, je sais pas pour vous, mais moi oui) dans des sociétés urbaines dont l'environnement est ultra stimulant pour le cerveau : tout est conçu pour attirer le regard et cibler l'attention, pour créer du désir dirigé vers un objet, une activité, ou quoique ce soit d'extérieur et de consommable d'une façon ou d'une autre.

Même la culture, pour laquelle j'ai un peu plus d'intérêt que les pub Auchan, n'échappe pas à la règle. Si je marche dans la rue et que je vois une affiche pour un festival ou une expo qui m'intéresse, brusquement je ne suis plus ici et maintenant, dans mon corps en mouvement ou plongée dans mes pensées, mais je me projette dans mon planning pour savoir quand et éventuellement avec qui je pourrais y aller.
Par ailleurs cette information m'est disponible immédiatement, m'économisant la démarche de me dire : "Tiens, j'ai envie de voir une expo, un concert..."  et de faire l'effort de chercher comment je peux trouver l'information qui m'intéresse et satisfaire mon envie. Or ici, ce n'est pas le désir qui précède, mais l'information qui crée le désir.

Chez nous, la télé et internet se chargent de combler notre éventuelle vacuité. Si nous cherchons à nous remplir, nous trouvons sans difficulté des choses pour assouvir ce besoin, jusqu'à l'indigestion.

Au moment où j'écris, je pense au livre de Nicholas Carr, traduit en français sous le titre Internet rend-il bête ? Dans cet ouvrage, l'auteur avance que l'esprit humain est naturellement dispersé, fragmenté, pour s'adapter à son environnement : L'attention, la concentration sont labiles, mobiles, pour pouvoir répondre rapidement aux stimulations du monde qui l'entoure et favoriser la survie.
Internet, dans son développement actuel, encourage cette dispersion. Dès lors qu'on se connecte, on est bombardés par une multitude de bribes d'information, passant de l'une à l'autre au gré de la curiosité qui s'en détache aussitôt qu'elle s'ennuie. Et elle s'ennuie vite, surtout lorsqu'un léger bip ou une icône clignotante vient la solliciter.

Autant de temps en moins pour la rêverie...

Conséquence de cette évolution, la capacité à se concentrer durablement sur une lecture, qui est le pivot de l'apprentissage et de la mémorisation dans notre mode d'éducation, diminue chez les générations post-internet. Et même pour ceux des générations précédentes, la tentation est grande de se nourrir de fragments piochés ici et là, plutôt que de se plonger dans la pensée d'un auteur, dans un article de fond ou une longue synthèse.

Il n'est pas question ici de juger de ce phénomène pour lui même, mais si notre tendance est naturellement la dispersion, il me semble que le trop plein de stimulations fait de nous des machines à réagir, plutôt que des êtres humains qui imaginent des dieux pour peupler leur vide intérieur, leurs rêveries, leur crainte de la nuit ... 
Bien sûr, on ne crée jamais à partir de rien, cependant il faut aussi du rien pour créer.

Dans nos cultures, le temps dont nous disposons DOIT être rentabilisé, amorti. N'est-ce pas plutôt parce que nous avons peur du vide, ce vide qui nous renvoie souvent à l'insignifiance de nos existences ?

Dans La condition de l'homme moderne, Hannah Arendt développe l'idée que l’œuvre d'art est la quintessence du concept d’œuvre, en tant qu'elle a perdu son utilité. L’œuvre, et par extension l’œuvre d'art, échappe aux cycles naturels et donc à la mort. Elle permet à l'homme de s'incarner et d'incarner son monde de manière durable, permanente, elle est « la patrie non-mortelle des hommes mortels ».

Si l'on apprivoise ce temps mort, cet espace vacant qu'on nomme quelquefois à tort ennui et qu'on ne cherche pas systématiquement à le remplir avec n'importe quoi, cette peur du vide engendre du désir, pulsion de vie par excellence. Et qu'est ce que la création sinon du désir ? Un désir qui cherche un autre objet que ceux qu'on a l'habitude d'investir, un objet en devenir qui mèle intérieur et extérieur dans une forme singulière.
Une pensée peut être poétique, un regard, un geste ... : c'est le début.

"L’art c’est du désir brut."
Alechinsky dans la revue Cobra n° 4, 1949